Du solaire thermique pour décarboner un site agro-alimentaire

04 04 2021
Clément Cygler
NewHeat

D’ici quelques mois débuteront les travaux de la plus grande centrale solaire thermique française sur le site de Lacto Sérum France, filiale de Lactalis, installé dans la Meuse. D’une puissance de 13 MW, elle permettra de diminuer de 11 % la consommation de gaz de l’usine.

Pour améliorer la qualité de sa production de lactosérum, cette poudre issue du petit lait et valorisé dans différents produits agro-alimentaires, Lacto Sérum France, filiale de Lactalis, a modernisé en 2018 son site de transformation de Fromeréville-les-Vallons, à proximité de Verdun. Une nouvelle tour de séchage, représentant un investissement de 40 millions d’euros, est venue remplacer les deux anciens ouvrages en activité depuis 1967, année de l’ouverture du site meusien.

La transformation du process industriel a permis à Lactalis de réfléchir également au volet énergétique, notamment à l’intégration d’une centrale solaire thermique. Après trois années d’études et de développement, un contrat de fourniture de chaleur solaire a ainsi été signé pour 25 ans entre l’industriel et l’entreprise NewHeat. Cette dernière, comme pour ses précédents projets, est en charge du financement, de la construction et de l’exploitation de la centrale dont la mise en service est prévue en 2022. Ces 15000 m² de capteurs fixes pour une puissance de 13 MW en feront la plus grande installation solaire thermique française et la plus grande d’Europe alimentant en chaleur un site industriel.

2 000 tonnes de CO2 évitées

La transformation du lactosérum nécessite une étape finale de déshydratation qui s’effectue dans une tour de séchage où circule de l’air à une température de 160°C. Le rôle de la centrale solaire thermique sera de fournir à l’usine la chaleur renouvelable nécessaire pour préchauffer l’air de la nouvelle tour de séchage. Plus en détails, les 15 000 m² de capteurs vont venir chauffer l’eau d’une cuve de stockage de 6 000 m³, soit le volume de deux piscines olympiques. Cela correspond à environ trois jours de production estivale et permet de faire correspondre le besoin en chaleur du client avec la production solaire. Ce volume est également important pour définir la meilleure stratégie de stockage, en particulier pour maîtriser la stratification. « Cela nous permet d’alimenter notre client avec l’eau la plus chaude possible située en haut de cuve et d’envoyer l’eau la plus froide possible dans les capteurs pour optimiser la performance du champs solaire. En temps réel, on va monitorer grâce à une vingtaine de capteurs le remplissage de la cuve et la qualité de cette thermocline, c’est-à-dire ce front entre l’eau chaude et l’eau froide », précise Hugues Defréville, président de NewHeat.

Échangeurs eau/air

À la sortie de cette cuve, un réseau de tuyauteries transportant l’eau chaude rejoint le process industriel en trois points d’intégration : des batteries d’échanges eau/air dont la principale est située en haut de la tour de séchage (à plus de 20m de haut). Ces batteries, sortes de gros radiateurs de voiture, vont permettre de préchauffer l’air. « Pour les besoins du site, il n’est pas nécessaire d’atteindre une température consigne. On chauffe autant qu’on peut, au fil du soleil. L’été, l’eau va pouvoir être préchauffée jusqu’à 90 °C, et une chaudière gaz apportera le complément pour monter à 160°C, température exigée par le process de séchage », indique Hugues Defréville. En hiver, la centrale fournira naturellement une chaleur à une température plus basse, et lorsqu’il n’y aura plus d’eau chaude disponible dans la cuve de stockage, la chaudière gaz assurera seule cette charge. La centrale solaire thermique permettra de diminuer de 20% la consommation d’énergie fossile de la tour de séchage, soit 11% à l’échelle de l’usine. Environ 2 000 tonnes de CO2 seront ainsi évitées par an.

Financement bancaire global

Au niveau de l’investissement nécessaire, le budget prévisionnel de la centrale solaire thermique s’élève à environ 5 M€. Un montant supporté par New Heat avec le soutien du Groupement d’intérêt public Objectif Meuse et de la région Grand Est. La centrale s’inscrit par ailleurs dans une opération de financement de cinq projets solaires thermiques, comprenant la mise en place d’un financement bancaire global d’un montant de 13 M€ auprès des banques Triodos Bank et Crédit Coopératif. Enfin, retenu par l’Ademe dans le cadre de l’appel à projets “Grandes installations solaires thermiques”, le projet devrait recevoir 2,4 M€ du Fonds Chaleur. Des aides jugées aujourd’hui indispensables par Hugues Defréville pour parvenir à un prix compétitif de la chaleur solaire, en attendant la mise en place d’un prix du carbone suffisant.

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